Kagyupa

Un article de Nezumi.

La lignée Kagyü, Kagyu ou Kagyupa (tibétain : Bka'-brgyud-pa) est l'une des 5 grandes traditions contemporaines du bouddhisme tibétain.

Son nom peut se traduire par « transmission orale ». Elle s’est constituée au XIe siècle à partir d’enseignements indiens récemment importés et s'est rapidement divisée en de nombreuses branches, dont quatre restent notables au XXIe siècle. Les plus importantes sont Karma Kagyu (Karma Bka'-brgyud-pa), la mieux implantée en dehors des régions himalayennes, avec à sa tête le Karmapa, et Droukpa Kagyu ('Brug-pa Bka'-brgyud-pa), religion officielle du Bhoutan. Drikung Kagyu et Taklung Kagyu sont deux branches moins développées. Shangpa Kagyu, une branche parallèle disparue au XVIe siècle, a refait surface au XIXe siècle.

Histoire

La tradition kagyu fut la première à transmettre l’enseignement du mahamudra, adopté ultérieurement à l’intérieur du courant gelugpa à l’initiative du 4e Panchen Lama, Lobsang Chökyi Gyalsten (1570-1662), donnant naissance à la tradition Ganden-Kagyu.

Selon la tradition bouddhiste, Siddharta Gautama a laissé plusieurs sortes d'enseignements adaptés aux différentes capacités des êtres, inclus dans le sutrayana (voie des sutras) et le tantrayana (voie des tantras) ; le bouddhisme tibétain ressortit essentiellement à la seconde voie. Les premiers disciples du Bouddha ont consigné par écrit ses enseignements oraux ; par la suite, des maîtres ont écrit de nombreux traités en expliquant le sens. À travers les siècles, différentes lignées de transmission se voulant authentiques et précises apparurent, chacune avec ses propres caractéristiques.

Au VIIIe siècle, le roi Trisong Detsen invita Guru Rinpoché et Shantarakshita au Tibet et initia la traduction d'importants textes bouddhistes. C’est ainsi que naquit la tradition nyingmapa, l' « ancienne tradition », dont les enseignements s'appuient sur les textes de cette première période de traduction.

La principale tradition kagyu remonte à Marpa le Traducteur (1012-1097), médiateur de la pensée des mahāsiddhas (sage) indiens Tilopa (988-1089) et Naropa (1016-1100). Il fut l’élève direct du dernier, dont il obtint en particulier les quatre transmissions (bK'n-babs-bzhi) de Tilopa et le mahamudra ou « grand sceau », un des systèmes de techniques de libération propre au vajrayana, avec le dzogchen. En Inde il étudia aussi auprès de Maitripa, Jnanagarbha et Kukuripa. De retour au Tibet, il reçut d’Atisha l’enseignement Kadampa, une ancienne tradition sarmapa absorbée ultérieurement par les traditions gelugpa et kagyupa. Milarepa, son disciple, serait devenu le dépositaire de l’enseignement de la méditation, tandis que d’autres disciples tels que Choku Dorje, Tsurton Wange et Meton Chenpo auraient reçu son enseignement philosophique. Ces deux traditions de méditation (sGub-grva) et de philosophie (bShad-grva) sont maintenues dans les monastères kagyu.

Parmi les nombreux disciples de Milarepa, Gampopa (1079-1153) et Rechung Dorje Drakpa ou Rechungpa (1084-1161) sont chacun à l’origine d’une branche de kagyu. Celle de Rechungpa, Rechung Kagyu ou Dechog Nyangyud, « tradition orale de Dechog » (déité), a disparu en tant que lignée indépendante, mais son enseignement a été repris par Drukpa Kagyu et le groupe Surmang de Karma Kagyu. Gampopa, dépositaire du mahamudra et des six yogas de Naropa, fonda Dakpo Kagyu, lignée-mère qui se divisa rapidement en 4 branches fondées par trois disciples directs et un disciple de deuxième génération.

Il y eut au cours des siècles de nombreuses branches kagyu, dont les plus connues sont les « quatre grandes écoles » (Phaktru, Karma, Tsalpa, Barom) et les « huit petites écoles » (Drikung, Drukpa, Taklung, Drukpa, Yasang, Shuksep, Yelpa, Martsang).

Textes et pratiques, édifices

Hormis le canon tibétain rassemblé dans le Kanjur et le Tanjur les différents courants kagyu se basent sur des textes plus spécifiques, comme ceux attribués à Marpa, Milarepa (Les cent mille chants), Gampopa (Le Précieux ornement de la libération), Drikhung Kyöppa Jigten Sumgön, Drukpa Kunkhyen et Pema Karpo, ainsi que les différents Karmapas. Jamgon Kongtrul Lodrö Taye (1813-1899) l’un des fondateurs du mouvement œcuménique rimé, a compilé le Trésor des mantras kagyu, rassemblant l’essentiel des enseignement, onctions et sadhanas (méditations).

Comme toutes les lignées du vajrayana, kagyupa enseigne la voie tantrique dite « voie des upayas » (thabs lam), qui propose différents yogas formant une progression graduelle. Les yidams principaux sont Cakrasambhava et sa parèdre Vajrayogini ou Vajravarahi, les principaux dharmapalas sont Dorje Bernakchen et Palden Lhamo, avec des différences possibles selon les courants ; ainsi, Chagdrupa est un dharmapala plus spécifique à la lignée Shangpa. Une spécificité de kagyupa est le système des six yogas de Naropa (nA ro chos drug) employé dans la phase de complétion des anuttarayoga-mères. L’adibuddha est Vajradhara.

Kagyu transmet également une voie de libération (grol lam) non tantrique en quatre stades : les quatre yogas du mahamudra (phyag rgya chen po), repris par une partie du courant gelugpa.

De nombreux monastères kagyupa sont apparus au fil des siècles au Tibet et dans l’Himalaya. Les plus célèbres sont Dhaklha Gampo, dans le Tibet méridional, fondé par Gampopa, et Tsourphou fondé par le 1er Karmapa dans la vallée de Tölung au Tibet central, et toujours siège officiel du hiérarque de Karma Kagyu. Citons encore Palpung, Jamgon Kongtrul, Surmang et Ralung, siège du hiérarque de Drougpa Kagyu. Rumtek au Sikkim fut fondé par le 16e Karmapa en exil. A Lhodrak au sud du Tibet, région d’origine de Marpa, on montre encore les vestiges d'une tour de neuf étages dont la tradition attribue la construction à Milarepa.

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