Jean-Jacques Lebel

Un article de Nezumi.

Jean-Jacques Lebel, né à Paris en 1936, artiste plasticien, écrivain, créateur de manifestations artistiques. Il est le fils de Robert Lebel, critique d'art. À New York pendant la guerre, il rencontre Marcel Duchamp, André Breton et Billie Holliday avec lesquels il noue une relation intense qui durera leur vie durant.

Biographie

En 1955, sa première exposition a lieu à la Galleria Numero à Florence, Italie. Après un passage chez les Surréalistes, il expose à Milan, chez Arturo Schwarz, chez Iris Clert et chez Simone Collinet à Paris, puis dans d'innombrables musées et galeries à travers le monde. La même année, il publie sa première revue d’art et de poésie Front Unique dans laquelle interviennent entre autres Benjamin Peret, Roberto Matta, Francis Picabia, Wilfredo Lam, André Breton, Kostas Axelos, Joyce Mansour. Membre trop turbulent du mouvement surréaliste, il en est exclu pour indiscipline en 1959.

En 1960 à Venise, il est l’auteur, de l’Enterrement de la Chose, action directe qui fut considérée par les historiens comme le premier happening européen. Il prend position contre la guerre d’Algérie et la torture en co-organisant la manifestation « Anti-Procès » à Paris, à Venise et en 1961 à Milan où est exposé le Grand Tableau Antifasciste Collectif peint par Enrico Baj, Gianni Dova, Roberto Crippa, Errò, Jean-Jacques Lebel et Antonio Recalcati. Cette œuvre est d’abord censurée pendant vingt-quatre ans, puis fera le tour des musées européens et l’objet d’un livre-manifeste collectif.

Dès 1962, il publie le premier essai critique en français sur le mouvement des happenings à travers le monde. À partir de cette date, il produit plus de soixante-dix happenings, performances et actions, sur plusieurs continents, parallèlement à ses activités picturales, poétiques et politiques, avec Claes Oldenburg, Allan Kaprow, puis avec Tetsumi Kudo, Errò, Carolee Schneemann, Yoko Ono, Nam June Paik, Charlotte Moorman, Robert Filliou, Earle Brown et Ben dans le cadre du Festival de La Libre Expression qu’il crée en 1964.

Dans les années soixante, il traduit en français et publie William Burroughs, Allen Ginsberg, Michael McClure, Lawrence Ferlinghetti et Gregory Corso.

En juillet 1967, il monte la création de la pièce de théâtre de Pablo Picasso, Le Désir attrapé par la queue (1944), dont une célèbre première lecture, menée par Albert Camus, avait eu lieu durant l'Occupation à Paris dans le salon de Michel Leiris. Cette pièce réunit Taylor Mead, Rita Renoir, Ultra Violet et le groupe de rock anglais, Soft Machine.

En 1968, Jean-Jacques Lebel prend part aux activités du « Mouvement du 22-mars », puis du Groupe anarchiste « Noir et rouge » et à « Informations et correspondances ouvrières ». Il suit l’enseignement du philosophe Gilles Deleuze à la Faculté de Vincennes.

En 1970 il codirige avec Daniel Guerin la collection « changer la vie » chez Pierre Belfond où seront réédités plusieurs grands textes historiques du mouvement anarchiste international. Se considérant en exil intérieur, il déserte le monde de l’art afin de se consacrer à ses activités underground.

En 1979 il fonde avec François Dufrêne et Christian Descamps puis Jacqueline Cahen, le Festival International Polyphonix, manifestation nomade qui s’ouvre aux poètes, cinéastes, musiciens et performeurs de tous horizons, constituant un laboratoire autonome des mouvements "rhizomatiques".

En 1988, Jean-Jacques Lebel met fin à son exil et reprend son activité publique d’artiste. Dans cette période, il conçoit d’importantes expositions présentées dans des musées européens dont le point de vue renouvelle radicalement le regard porté sur des œuvres d’artistes comme: Victor Hugo, peintre : Musée d’Art Moderne de Venise en 1993 ; Picabia/Dalmau IVAM Valence, en 1995, Cent Cadavres Exquis, Juegos Surrealistas : Fundaciòn Colleccion Thyssen-Bornemisza, Madrid 1996, Jardin d’Eros Barcelone en 1999, Picasso érotique, Musée des Beaux-Arts de Montréal, en 2001 ; Le labyrinthe Artaud, Dusseldorf et Milan, en 2005 ; L’un pour l’autre, les écrivains dessinent Imec/Caen 2007 et 2008

En 2001 et 2002 : manifestation itinérante sous forme d'installation polymorphique et évolutive, « Reliquaire pour un culte de Vénus », composée de plus de trois mille éléments collectés à travers l’Europe. Elle se déroule au FRAC de Basse-Normandie à Caen, au Casino de Luxembourg, au CRÉDAC d’Ivry, à la villa Tamaris de la Seyne-sur-Mer puis en 2003 à l’Institut français de Barcelone.

Il poursuit simultanément son œuvre plastique et réalise des installations marquantes présentées dans de nombreux musées comme Le Monument à Felix Guattari en 1994 dans le cadre de l’exposition Hors-Limite l’art et la vie au Centre Georges Pompidou en hommage au psychanalyste récemment disparu.

Ces dernières années son activité d’artiste, d’inventeur d’expositions et d’organisateur de festivals internationaux continue de se mixer pour constituer de fait une œuvre au-delà des genres, démolissant les cloisonnements entre les langages, les techniques et les époques et surtout entre l’art et la vie. L’état de soulèvement permanent est une caractéristique de ce mode de vie intrinsèquement collectif, transculturel et libertaire.

En 2007, il réalise un film Les Avatars de Vénus, autour de la figure de Vénus, réalisé à partir du procédé de morphing. Jean-Jacques Lebel est également co-auteur avec François Pain d'Un monument à Félix Guattari, film réalisé à partir de l'événement qu'il organisa au Centre Pompidou en 1994. Ces deux films sont distribués par Le peuple qui manque.

Il présente l' exposition "Soulévement" à la Maison rouge du 25 Octobre 2009 au 17 Janvier 2010. Le titre : « Soulèvements » par-delà son sens évident, suggère des significations qui vont du politique au poétique, du réel à ses représentations, de la pensée aux langages les plus diversifiés. C’est sous l’égide de ce vocable polysémique que sont associées, afin d’esquisser la silhouette existentielle de cet insurgé, ses propres œuvres, celles de ses amis et compagnons, ainsi que les objets d’art ou de combat qu’il a réunis autour de lui et dont il nourrit sa subjectivité.

Le parcours est organisé selon des thèmes qui correspondent aux obsessions de Jean-Jacques Lebel quant à l’énigme posée par l’œuvre et au contexte collectif de son émergence. Happenings, Insoumission, Poésie, Hallucination, Eros, Dada, la Guerre ou le Rhizome… en sont quelques exemples. Ces ensembles interconnectés permettront au visiteur d’entrer en relation avec quelques-unes des principales installations de Jean-Jacques Lebel, des œuvres d’Arts Premiers ou d’artistes anonymes mais aussi, celles d’alliés aussi importants que Johan Heinrich Füssli, Giuseppe Arcimboldo, Louise Michel, Fourier, Ravachol, Guillaume Apollinaire, Marcel Duchamp, Pablo Picasso, Otto Dix, André Breton, Francis Picabia, Antonin Artaud, Bernard Heidsieck, Erró, Antonio Saura, Konrad Klapheck, Öyvind Fahlström, Peter Saul, Camilla Adami, Orlan .

En 2018, au Palais de Tokyo, Kader Attia & Jean-Jacques Lebel présentent L'Un et l'Autre
Ils déclarent: L’Un et l’Autre est un laboratoire de recherche plutôt qu’une exposition. Il est né de l’échange de nos regards, d’une alliance doublée d’une profonde amitié entre nous. Nous y présentons certains de nos travaux liés aux enjeux majeurs de notre civilisation, principalement deux installations : la première consacrée à la fabrication dans et par les médias dominants de l’Autre absolu, comme une entité à craindre, violente et belliqueuse, le Satan, le Sauvage, le Terroriste – ; la seconde consacrée à la persistance transhistorique de l’humiliation, du viol et de la torture en tant que crimes de guerre impérialiste. En contrepoint de ces installations, nous présentons des objets énigmatiques et polysémiques que nous avons collectés ici où là, des objets chargés d’esprits invisibles à l’oeil nu, qui nous parlent à tous, nous transmettent des discours codés, et procèdent à des réparations et des détournements.


Retrouvez tous les détails de la filmographie de Jean-Jacques Lebel sur sa fiche IMDB

Ouvrages de et sur Jean-Jacques Lebel

  • Jean-Jacques Lebel: des années cinquante aux années quatre-vingt-dix, Mazzotta, Milano, 1991, 78 p., ill., colour, b&w.
  • Jean-Jacques Lebel: Retour d'exil. Peintures, dessins, collages 1954-1988, Galerie 1900/2000, Paris, 1988.
  • Jean-Jacques Lebel, Le happening, Les Lettres Nouvelles, Denoël, 1966, 89 p.
  • Jean-Jacques Lebel, : Poésie en action, in: Janicot, Francoise (ed.): Poésie en Action, Loques - NèPE, Issy-les-Moulineaux, 1984
  • Jean-Jacques Lebel, : Rue Rossini. Les rencontres Rossiniennes, Galleria di Franca Mancini, Pesaro, 1996, 47 p.
  • Catherine Millet: Jean-Jacques Lebel, az örök lázadó. Jean-Jacques Lebel Permanent Rebel, in: Hegyi Dóra (ed.)

Galerie

lebel2018.jpg
L'Un et l'Autre, Palais de Tokyo, 2018

Voir aussi Les films d' Ann ; le cinéma de Nezumi; les Artistes contemporains / Randonnées dans les Pyrénées

Voyages : les merveilles du Japon; Les temples et des montagnes du Népal