Bill Viola

Un article de Nezumi.

Bill Viola est un artiste américain né à New York le 25 janvier 1951. Il s'est principalement illustré par la création de monumentales installations et est un des pionniers de l’art vidéo.

Parcours

Bill Viola étudie les arts plastiques à la Syracuse University de New York mais, n'étant pas à l'aise dans les cours qu'il trouve trop traditionnels, il rejoint une section créée par le professeur Jack Nelson pour les élèves inadaptés aux autres sections, "l'expérimental studio", où il entre en contact avec la vidéo.

Plus intéressé par la musique que par l'image, il suit des cours de musique électronique sur synthétiseur, ce qui lui permet d'appréhender le signal électronique comme un matériau avec lequel il peut travailler.

Fasciné par la « continuité du signal vidéo par rapport à l'attente qu'induit le développement de pellicule », il aborde ainsi la vidéo en terme de signal et non d'image. Totalement enthousiasmé par ce nouvel outil, Viola dit avoir fait en 1973 plus de bandes que durant n'importe quelle autre année.

En 1972, il commence à mettre en place des installations vidéo en utilisant des moniteurs, puis des projections de ses vidéos sur de grandes surfaces dès 1973. Viola participe à cette effervescence qui entoure le tout nouvel art vidéo dans des manifestations, avec des gens comme Nam June Paik, Bruce Nauman, Richard Serra, et est, comme eux, influencé par le performance art. Ainsi, en 1975, dans une performance intitulée Free Global Distribution, il tente pendant une journée d'apparaitre sur le maximum de photographies de touristes à Florence.

Vers le milieu des années 70, il se met à voyager en Orient pour entamer une quête spirituelle. En 1980, lors d'un voyage au Japon à la faveur d'une bourse d'étude, il rencontre le maître zen Daien Tanaka qui devient son guide spirituel.

Bill Viola décrit ses premières bandes en citant Marshall McLuhan : « Le médium, c'est le message », c'est-à-dire que leur sujet, ce qui est mis en scène, c'est la technologie vidéo elle-même; mais il se dit ensuite qu'il doit aussi considérer à part égale le système perceptif humain, ce qui transparaît dans Red Tape (1973) qu'il considère comme une bande de transition vers la prise en compte du spectateur.

Viola cherche désormais, dans une démarche intimiste, à exprimer son cheminement émotionnel et spirituel, où il n'hésite pas à donner des images de lui-même ou de sa famille. Il fait également souvent appel à des thèmes récurrents : la vie, la mort, le sommeil, le rêve, l'eau, le feu, le désert…

Par exemple, en 1991, il réalise The Passing : cette vidéo est une réflexion sur la vie et la mort, en réaction aux évènements presque simultanés de la mort de sa mère et de la naissance de son deuxième fils. On peut y voir, accompagnés de sons sourds angoissants, des images de son fils, de sa mère agonisant sur son lit d'hôpital, de paysages déserts, de Viola se réveillant en sursaut dans son lit, d'objets tombants au ralenti ou dans l'eau, etc.

On considère généralement qu'il existe deux principaux courants dans la vidéo américaine : l'un, exubérant et ludique, trafique et dénature les images à l'aide d'effets divers; son chef de file est Nam June Paik, l'autre est plus discret et moins transformateur et Viola en est sans doute devenu le représentant le plus (re)connu.

En 1995, il représente les États-Unis à la Biennale de Venise, où il expose The Greeting; dans l'intention de donner vie à la peinture du Moyen Âge et de la Renaissance, l'œuvre inspirée de la Visitation de Pontormo (1528-1529) présente sur un écran plat à cristaux liquides (le support vidéo le plus ressemblant à un tableau) des mouvements ralentis de gens figurant les modèles des peintures anciennes. En 2001, elle a été la première œuvre d'art vidéo acquise par le Metropolitan Museum of Art de New York. En janvier 2004 s'est terminée l'exposition The Passions à la National Gallery de Londres où, pour la première fois, une exposition était entièrement consacrée à un artiste contemporain.

Les aspects de ses expérimentations

La remise en cause de la perception humaine

  • Relativité du grand et du petit

Jeu des échelles… macrocosme-microcosme

  • L'espace-temps

Toutes les réalisations de Viola explorent, à travers divers procédés, l'espace-temps.

La multiplicité des techniques

Afin de pousser les limites de notre perception, Bill Viola utilise toutes sortes de dispositifs de captation : il ajoute à ses caméras des systèmes optiques habituellements réservés à la saisie d'images pour la science, comme un téléobjectif 800mm pour pénétrer le désert de Chott-el-Djerid, ou un objectif macro pour cadrer une goutte d'eau… Il bricole également des systèmes saugrenus de prises de vues avec miroirs, moteurs et mécaniques pour élargir le champs de vision ; pour The Semi-Circular Canals, par exemple, la caméra est installée à l'extrémité d'une planche suspendue à un arbre. Il n'y a pas, ou peu, de trucages dans les images de Viola, tout au plus du ralenti ou de l'incrustation au service d'un réalisme. Grâce à la mise en scène, au montage et à la sonorisation, il donne un sentiment d'étrangeté à l'image la plus banale.

Bill Viola, performeur

Sa pratique de la méditation, qui engage la personne toute entière aussi bien physiquement que mentalement, l'amène à se livrer lui-même dans ses bandes à des expérimentations mettant en jeu ses propres limites.

Ses œuvres

Vidéos
Liste non exhaustive de ses vidéos :

  • Migration (1976)

Durée : 7 minutes.
Image d'image, goutte d'eau comme métaphore de la vidéo.
Corps traités électroniquement.

  • The Reflecting Pool (1979)

Durée : 7 minutes.
Une des œuvres les plus importantes de l'art vidéo.
Apparition-disparition du reflet d'un corps sur l'eau.

  • Ancient of Days (1979)

Réflexion sur la temporalité.
Succession de plusieurs événements : Bill Viola fixe des objets sur une table et y met feu, il se filme en même temps et montre le tout à l'envers.
Plan fixe sur un obélisque à Washington sur toute une journée.
Description d'une avenue de New York sur 180° (mouvement giratoire) sur une journée.
Vue du mont Fuji.
Un enfant joue en premier plan et en second plan le mont Fuji est tantôt caché par les nuages, tantôt dégagé…
Cette image est ensuite saisie sur un panneau publicitaire dans une ville, puis on voit les gens de cette ville au ralenti.
Une nature morte.
Une horloge qui marque le temps, un bouquet de fleur (thème des vanités).

  • Chott el-Djerid (1979)

Durée : 28 minutes.
Silhouette flageolantes, mirage dans le désert.
Mouvements lents mais temps réel.

  • The Space Between The Teeth

Réflexion sur le son et l'espace.
Expérience réduite à une photo jetée à la mer.
L'eau engloutie la photo.
Un homme boit, puis travelling avant du couloir à sa bouche qui crie.

  • Raisons To Knocking At An Empty House (1983)

Durée : 19 minutes 11 secondes.
Enfermé dans la même pièce pendant 3 jours, Bill Viola se filme, en plan fixe, à lutter contre le sommeil (Autoscopie).
Temps réel compressé en 19 minutes
(référence inversée à Douglas Gordon qui ralentit les films).

  • Anthem (1983)

Durée : 11 minutes 30 secondes.

  • I Don't Know What It Is I Am Like (1986)

Durée : 89 minutes.
Jeu sur le changement d'échelle : le bison puis l'oiseau sur son dos, l'œil puis le reflet du cameraman, l'arbre dans le verre, le reflet de Bill sur le robinet...

  • The Greeting (1995)

Durée : 10 minutes.
Interprétation de la Visitation de Marie d'après la peinture italienne du Moyen-Âge: Trois femmes, dont une enceinte, se rencontrent dans une rue imaginaire. Temps réel dilaté 45 secondes

  • The Lovers (2005) vidéo couleur HD sur écran plasma. Performers : Lisa Cohen, Jeff Mosl
    Deux amants luttent pour rester debout et se soutiennent l’un à l'autre au milieu d'une violente déferlante qui les submerge.

Installations

  • He Weeps for You
  • The Sleepers

Pour prolonger la dimension lyrique de son œuvre, Bill Viola conçoit ses installations comme des espaces dans lesquels les spectateurs sont invités à s'immerger pour ressentir ses émotions. Dans The Sleepers (1992), on retrouve l'eau, le sommeil et la solitude, thèmes chers à Viola, immergés dans de l'eau au fond de sept barils, sept moniteurs diffusent chacun en boucle le visage d'une personne endormie en gros plan. La pièce est plongée dans l'obscurité, la seule lumière est celle qui provient des barils et se diffuse dans la pièce. Ici, l'effet n'est nullement dans l'image on ne peut plus banale, mais c'est le dispositif qui donne sa force à l'installation.

Cette installation, qui fait partie de la collection du Musée d'art contemporain de Montréal, a été prêtée en 1998 pour l'exposition itinérante Bill Viola qui est passée par différentes villes des États-Unis et d'Europe; Viola y pousse encore plus loin le dispositif de l'installation, il a imaginé l'aménagement et la configuration des salles de cette énorme exposition regroupant notamment 18 installations, afin de faire interagir certaines d'entre elles.

Galerie

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The Lovers, 2005

Voir aussi Les films d' Ann ; le cinéma de Nezumi; les Artistes contemporains / Randonnées dans les Pyrénées

Voyages : les merveilles du Japon; Les temples et des montagnes du Népal