Érotisme et hindouisme

Un article de Nezumi.

L'érotisme a un rôle central dans le phénomène de la vie pour l'hindouisme. Il précède la naissance de tout ce qui est, de tout ce qui a été crée. L'incarnation de la création est le phallus ou lingam, symbole de Shiva. Le Linga Purana explique que "le monde entier a pour base le phallus. Tout est issu du linga. Celui qui désire la perfection de l'âme doit vénérer le linga."

Il existe donc une double fonction à l'acte sexuel. L'une reproductrice, indispensable à la survie de l'espèce et à la continuité de la vie. L'autre est l'érotisme, le plaisir qui devient un contact avec le divin.

L'érotisme, sous le nom de Kama, est l'un des quatre buts de vie d'un hindou. Il fait partie de la réalisation de l'être humain et prédomine chez le jeune adulte.

Cette tendance est renforcée dans le tantrisme. Pour les adeptes de cette tendance, l'union des deux sexes élimine la polarité des contraires et conduit à l'indivisible originel qui précéda la création. Le dépassement de tout dualisme, qui coïncide avec la libération ultime, est obtenu à travers des rites et des formes de méditation particulières.

Au centre du culte tantrique se trouvent des rites de nature ésotérique porteurs de fortes connotations magico-symboliques. Des positions spécifiques des mains (mudrâ) expriment la tension de tout l'être sur le divin. Le nyâsa, rite qui consiste à toucher certaines parties du corps pour les identifier à la divinité, symbolise l'entrée de l'influx divin dans le corps du fidèle.

Les techniques érotiques sont détaillées dans de nombreux ouvrages, le Kama Sutra étant le plus connu. Kama signifie désir et sutra, fil ou tout simplement livre. Ces techniques sont liées à la pratique du yoga. Pour chaque posture de yoga, il existe une forme érotique et une forme non-érotique.

Le Kâmasûtra

Le Kâmasûtra (du sanskrit कामसूत्र (Kāmasūtra) composé de काम (Kâma) le désir (également dieu de l'amour) et सूत्र (Sûtra) le livre, est un recueil indien écrit entre le IVe siècle et le VIIe siècle, attribué à Vâtsyâyana.

Le Kâmasûtra évoque successivement "les trois buts de la vie", "les conseils de bon sens", "le comportement du citadin (Nâgaraka vritta)", "le choix d'une épouse" (Kanyâsamprayukta), "les devoirs et privilèges de l'épouse" ( Bharya Adhikarika), "les courtisanes" et "les méthodes occultes" ( Aupanishadika) en plus de toutes les pratiques plus directement liées à la sexualité (Samprayoga). Comme tous les textes de l'Inde ancienne, l'ouvrage peut être également lu comme une allégorie de l'union (yoga) au Divin.

Souvent richement illustré de miniatures, il prodigue des conseils de séduction pour une vie harmonieuse dans le couple, notamment au travers de positions sexuelles ( les 64 positions ont fait la popularité de l'ouvrage, elles ne constituent toutefois qu'un chapitre du livre à proprement parler), destiné à l'origine à l'aristocratie indienne.

Le Kâmasûtra n'est donc pas seulement consacré au sexe mais traite également d'un art de vivre qu'une personne cultivée se devait de connaître. Il aborde par exemple l'usage de la musique, la nourriture, les parfums...

À l'origine, le Kâmasûtra était essentiellement destiné aux hommes et aux courtisanes. Cependant, le livre donne aussi des conseils aux femmes et aux couples et indique que les hommes n'étaient pas tenus à la seule relation sexuelle, mais devaient aussi maîtriser les baisers, les caresses, les morsures et les griffures. Il décrit un certain nombre de positions, mais également le comportement à tenir par les partenaires pour laisser ensuite place à leur imagination.

À l'époque où l'ouvrage a été rédigé, la femme jouissait d'une certaine liberté. On trouve dans l'ouvrage les habituelles injonctions pour "l'épouse fidèle" qui s'occupe de la maison, mais elles côtoient d'autres conseils pour la séduction et la manière de tromper son époux. Le remariage des veuves, qui sera interdit plus tard dans l'histoire de l'Inde, est alors décrit comme acceptable. Le Sati (sacrifice de la veuve sur le bûcher de son mari) n'est pas mentionné dans l'ouvrage original et n'apparaît que dans les rédactions plus récentes.

L'homosexualité féminine et masculine est un aspect jugé naturel de la vie sexuelle. Toutes les possibilités sexuelles, même celles qui seront jugées déviantes par la suite sont énumérées dans l'ouvrage.

Les représentations érotiques

Outres les illustrations (miniatures) des livres, les représentations érotiques sont courantes à l'extérieur des temples hindouistes.

Les temples, outre leurs fonctions sacrées de lieux où résident les divinités, jouaient, et bien sur jouent toujours, le rôle de livres d'images. Comme dans nos églises d'occident, l'iconographie peinte ou sculptée est plus libre à l'extérieur que dans l'enceinte sacrée. Une profusion extraordinaire d'images est la règle: Images de dieux sous leurs diverses formes, des êtres célestes compagnons des dieux, ou ennemis (démons divers...), images historiées des grandes épopées (le Mahâbharata et le Râmâyana), mais aussi images de la vie quotidienne et images érotiques.

La représentation érotique des temples peut être vue et comprise à trois niveaux :

  • Le niveau de la vie "ordinaire", "utilitaire". Le sexe existe, c'est une fonction naturelle de l'être humain; autant bien l'assumer et savoir comment. L'homme, mené par son sexe, a souvent tendance à s'en servir de manière pas très noble, en asservissant la femme à ses désirs. De plus, à la plupart des époques anciennes, la mortalité était telle que le'accroissement de la population était un objectif pour le puvoir.
  • Le niveau de la vie "élevée" des pratiquants du tantrisme, pour lesquels la pratique sexuelle constitue, au contraire, une voie de libération des conditionnements de l'être humain, pour autant qu'elle soit guidée par un enseignant qualifié (guru) et pour des motifs non attachés à la jouissance physique. Les postures spéciales adoptées exigent des compétences physiques hors du commun et ont des objectifs qui dépassent largement la sexualité "normale".
  • Le monde des dieux, êtres quasi-immortels engagés dans l'interaction des polarités Shiva/Shakti.

Par contre, il faut remarquer que les scènes d'accouplement mettent en scède de simples mortels. Les Dieux dans des jeux amoureux sont des êtres parés de tous les attributs de la beauté et de la séduction. On représente ces couples dans des postures certes sensuelles (par exemple le dieu enlace sa compagne, nymphe ou Shakti, sa main tenant gentiment son sein, et ils se regardent amoureusement), mais pas d'accouplement.

Les temples les plus connus pour leurs représentations érotiques se situent au Népal dans la vallée de Kathmandou, en Inde à Chattishgarh, Orissa et surtout Khajuraho , dans le Karnataka et le Tamil Nadu.

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